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Essais cliniques des biomédicaments : une optimisation sous le signe de la durabilité

Sabrina Ioudarene & Caroline Micheletti Candau
19 juin 2024
capgemini-engineering

Produits à partir d’une source biologique (cellule, bactérie…), les biomédicaments et les produits biologiques vivants permettent, en complément des médicaments de synthèse, de diversifier les traitements et de répondre à des besoins médicaux jusque-là insatisfaits : vaccins, immunothérapie, thérapies géniques, cellulaires, tissulaires…

Pour les laboratoires, les biomédicaments représentent un enjeu colossal, à la hauteur de leurs immenses promesses thérapeutiques… à condition, bien sûr, que celles-ci soient confirmées par les essais cliniques. Il faut en effet démontrer que le médicament fonctionne, mais aussi que son efficacité surpasse celle des traitements déjà sur le marché, et cela, sans engendrer d’autres maladies, trop d’effets secondaires, ou des risques supérieurs à ses bénéfices. Dans cette course qui n’a qu’un seul vainqueur, il ne suffit donc pas d’avoir mis au point le bon traitement : il faut aussi être le plus rapide et le plus efficace pour le montrer.

Lors de l’essai clinique, des patients recrutés dans le monde entier reçoivent, pour certains, le médicament candidat et, pour d’autres, un traitement existant, ou bien un placebo s’il n’y a pas d’équivalent. Pour ne pas courir le risque d’une rupture d’approvisionnement qui retarderait l’étude, voire l’invaliderait, les laboratoires avaient jusqu’ici pour habitude de constituer de larges stocks de médicaments à chaque étape du processus, de la fabrication jusqu’aux pharmacies hospitalières. Or, cette stratégie, qui occasionne des gaspillages importants (70 % de produits inutilisés), est de moins en moins soutenable d’un point de vue économique, éthique (comment, dans un contexte de pénurie, justifier d’accumuler des médicaments dont une partie se périmera et sera détruite ?) et environnemental (ces stocks superflus augmentent d’autant les besoins de production, de transport et de stockage, et donc leurs impacts). Surtout, une telle approche n’est plus possible avec les biomédicaments, qui sont beaucoup plus coûteux à fabriquer, délicats à transporter et difficiles à conserver (souvent à très basse température) que les médicaments de synthèse. Avec l’arrivée de ces nouveaux traitements, il devient donc impératif d’optimiser la supply chain des essais cliniques autant pour la fiabiliser et l’accélérer que pour en minimiser l’empreinte environnementale.

La clé de voûte : un pilotage stratégique global

Pour ne pas se contenter d’empiler les stocks de précaution, la priorité est de mettre en place un pilotage stratégique global. Ceci va permettre de décloisonner les différentes étapes de la supply chaîne des essais cliniques, de mieux partager les contraintes et les besoins de chacun en amont comme en aval, et ainsi de mieux coordonner chaque niveau. Par exemple, avoir de la visibilité sur différentes études permettra de mutualiser les productions et les emballages, que l’on pourra aussi standardiser au maximum. Toujours en ce qui concerne le conditionnement, ce n’est qu’en liaison étroite avec les exigences du protocole que l’on pourra définir le format et le nombre de doses optimaux. À l’inverse, intégrer les contraintes logistiques lors de la conception de l’étude permet, par exemple, de limiter les expéditions. On aura également besoin de cette vision globale pour calculer précisément, et suffisamment tôt, les besoins cliniques en tenant compte de tous les paramètres : pays participants, nombre de patients, protocole, règlementation…

Cette approche globale permet aussi de mieux articuler les optimisations propres à chaque étape : le recours à l’étiquetage électronique et à des matériaux alternatifs pour réduire l’impact du packaging ; l’équilibrage du protocole entre considérations médicales et pratiques pour obtenir les meilleurs résultats possibles ; l’optimisation des stocks de médicament comparateur et de leur distribution aux établissements ; la gestion, enfin, des échantillons biologiques prélevés sur les patients pour être analysés.

Le numérique, un outil indispensable

À l’ère de la bioproduction, l’optimisation de la supply chain passe enfin nécessairement par un recours accru aux solutions numériques, au premier rang desquels l’IRT (Interactive Response Technology), la pierre angulaire de la gestion des essais cliniques. Les laboratoires vont devoir utiliser à plein les riches fonctionnalités de cet outil complexe, ce qui, par manque de maîtrise, n’est aujourd’hui que rarement le cas. En revanche, il n’existe pas de moteur d’optimisation dédié à cette activité, mais Capgemini travaille à combler ce manque en adaptant une solution issue du secteur automobile. Enfin, l’IA générative pourrait vite se révéler incontournable pour aider tous les acteurs à s’orienter face à la multiplication des contraintes et des réglementations.

Étant donné le coût de développement et de production des biomédicaments, les laboratoires n’ont pas droit à l’erreur. Ils ont impérativement besoin de combiner toutes les solutions à leur disposition afin d’optimiser l’ensemble de la chaîne logistique des essais cliniques. Avec des quantités calculées au plus juste, ils minimisent les gaspillages, les besoins de stockage réfrigéré et de transport, et donc les impacts environnementaux, tout en garantissant le bon déroulement et la qualité de l’étude. Les objectifs de durabilité rejoignent ainsi les impératifs économiques, scientifiques, médicaux et réglementaires pour assurer le développement et la viabilité de ces nouvelles thérapies.

Nos expertes

Caroline Micheletti Candau

Global Clinical Supply Chain Leader, Capgemini Engineering
Après une formation universitaire en biologie cellulaire, Caroline a travaillé chez Sorebio (aujourd’hui Merck Biodevelopment) dans le contrôle qualité. À son retour, elle obtient un MBA en administration des affaires, tout en travaillant comme supply chain manager chez Sorebio, avant de rejoindre le monde des essais cliniques, où elle travaille depuis 25 ans. Elle rejoint Capgemini Engineering en 2023, pour développer l’activité Supply Chain Clinique et le secteur Sciences de la Vie en tant qu’Architecte au sein du bureau avant-vente.

Sabrina Ioudarene

Team Manager Life Sciences, Capgemini Engineering
Après un master d’ingénieur spécialisé en technologie pharmaceutique, Sabrina rejoint le groupe Capgemini en 2006 pour devenir acteur du développement de thérapies innovantes pour améliorer la vie des patients. Elle possède 18 ans d’expérience dans la conduite de projets de R&D Pharma. Fusionnant toutes les compétences qu’elle a développées, elle est à la tête du centre d’expertise Capgemini Clinical Supply depuis 8 ans. Elle dirige la livraison du portefeuille life science au sein la practsie Manufacturing & Operations. A travers cette fonction, elle développe des solutions innovantes pour les sociétés pharmaceutiques et supervise les projets de Capgemini Life Sciences (qualité de livraison, suivi des projets, satisfaction client et aspects financiers).
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